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Message de Ibrahima Bah
09.09.2003 11:48:05
Sujet: Alpha chez Blaise:Mandjanladji
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Alpha Condé cherche à se rapprocher de Blaise car les les sources de provisions du côté de Gbagbo commencent à s'épuiser.

Celui qui refuse depuis près d'un an les Interviews en Guinée et en France de peur de raconter des anneries, se voit obliger de parler finalement chez Blaise . Encore une fois il avoue avant les élections de cette année de manière déguisée comme son habillement à Piné, qu'il veut la force pour renverser Lansana Conté. Il oublie d'avoir dit au moment des législatives que dans l'histoire de la Guinée, seul Siradiou a voulu la violence contre son pays. Pourtant depuis 1998 Alpha est le seul opposant guinéen appauvrit de stratégie et qui parle de guerre civile en faisant le tour du monde tout en évitant la Guinée. Ses militants ont rejoint les autres partis dont les dirigeants font preuve de courage et de patriotisme. Alpha ne quitte presque jamais Paris et veut soit attendre la mort de Conté pour rentrer définitivement la Guinée ou les élections de cette année pour battre campagne.A New York il disait "JE SUIS SOUSSOU" Au Bourkina "JE SUIS MALINKÉ". Le ridicule ne tue pas. Je vous laisse lire cette interview pour voir encore une fois la face de cet homme boiteux et malade qui n'est en réalité pas mieux que Lansana Conté Physiquement. Si Lansana a perdu un doigt, Alpha en a perdu un pieds. Intellectuellement le faux universitaire ou faux prof n'est pas meilleur au paysan-cultivateur.



BONNE LECTURE:



Invité de la Rédaction: Le professeur Alpha Condé, Président du Rassemblement du Peuple de Guinée

(Sidwaya 22/08/2003)



Le célèbre opposant Guinéen, le professeur Alpha Condé, président du Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG) était l'un des invités de marque au 2e Congrès ordinaire du Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP) les 1er, 2 et 3 août dernier.



Malgré un calendrier assez chargé, l'homme a bien voulu être l'invité de Sidwaya le 5 août, peu avant son départ du Burkina.



Arrivé au Journal aux environs de 9 heures très décontracté, c'est avec beaucoup d'intérêt qu'il a suivi d'abord la conférence de rédaction du jour avant de "passer à la barre". Durant plus d'une heure d'horloge, Alpha Condé, dans un franc parler, a abordé avec les journalistes de Sidwaya sa contribution au Congrès du CDP, ses relations avec les hommes politiques burkinabè, la situation en Guinée, son regard sur l'actualité africaine et internationale.



Sidwaya (S.): Vous avez assisté au IIe congrès ordinaire du CDP. Que retenez-vous de ce congrès ?



Alpha Condé (A.C.): Je n'étais pas présent à l'ouverture mais mes amis ont permis à Ibrahim Boubacar Kéita (I.B.K) président de l'Assemblée nationale du Mali et à moi-même de présenter nos messages respectifs le samedi 2 août 2003. Avant d'aller au congrès, j'ai pris la peine d'acheter des journaux dans lesquels j'ai lu qu'il pourrait avoir une crise au sein du CDP. J'ai remarqué à l'issue des travaux qu'il y a eu une recomposition puisqu'il y a un président du parti ; ce qui n'existait pas. La prévision du trio "gagnant" de Sidwaya s'est réalisée. Le nombre des membres du bureau exécutif a été revu à la hausse. Il y avait de mécontents qui s'étaient mis à l'écart mais qu'on a retrouvés dans le Secrétariat exécutif : cela pour éviter qu'aux prochaines consultations électorales, il n'y ait pas de problèmes. J'ai aussi remarqué que le CDP a proposé des réformes électorales avec deux grands changements. Au lieu de la proportionnelle au plus fort reste, ce sera à la moyenne. On passera d'autre part de la région à la province. Ces propositions ne plaisent pas beaucoup aux partis de l'opposition. J'ai discuté à ce sujet avec mon grand-frère, le professeur Joseph Ki-Zerbo, qui estime que cela va beaucoup défavoriser l'opposition. S'il y a eu consensus autour du code électoral, cette réforme pourrait créer des problèmes avec l'opposition. J'ai été frappé par la mobilisation et j'estime que ce congrès du CDP l'a mis en ordre de bataille pour la présidentielle de 2005. La seule inquiétude que j'ai est que l'arrivée du code électoral à l'Assemblée nationale, tel que proposé par le CDP ne complique les relations entre le parti majoritaire et les partis d'opposition.



S.: Pour vous qui avez participé à un retour de la paix sociale au Burkina, quelle analyse et quels conseils donneriez-vous à la classe politique burkinabè par rapport à ce code électoral en préparation ?



A.C.: Je n'ai pas de conseils à donner parce que la classe politique burkinabè connaît la situation intérieure mieux que moi. Elle est responsable et essayera de trouver des solutions consensuelles. En 2002, le pouvoir et l'opposition se tournaient le dos et il fallait bien qu'il y ait le dialogue. A partir du moment où le débat est passé de la rue à l'Assemblée, je pense que la classe politique burkinabè trouvera des solutions appropriées.



S.: Quels hommes politiques burkinabè avez-vous rencontrés lors de votre séjour ?



A.C.: J'ai déjeuné avec le président avant-hier (NDLR l'entretien a eu lieu mardi 5 août), j'ai rencontré le grand-frère Ki-Zerbo, j'ai pu m'entretenir avec Hermann Yaméogo au téléphone. J'avoue que je n'étais pas informé de la situation qui prévalait au sein de l'ADF/RDA. Puisque ces temps-ci, j'étais beaucoup préoccupé par la situation en Guinée. C'est dans les journaux, à Ouagadougou, que j'ai découvert cette affaire. J'ai été très surpris. J'ai demandé à Hermann Yaméogo en tant que président, comment pouvait-il accepter que des personnes de son propre parti convoquent un congrès pour le destituer. J'ai trouvé cela surréaliste. Hermann m'a répondu qu'il le savait. Il a ajouté que cela lui a rendu service et qu'il est devenu plus populaire qu'avant. J'ai également posé la même question à Marlène Zébango qui m'a répondu qu'elle savait tout ce qui se tramait et qu'elle avait proposé que ces personnes soient exclues du bureau politique mais Me Hermann Yaméogo a minimisé le problème. J'avoue que je suis tombé des nues car je ne comprends pas que des militants d'un grand parti comme l'ADF/RDA puissent convoquer un congrès et débarquer le président. J'ai discuté aussi avec Halidou Ouédraogo au téléphone. Je rencontrerai certainement d'autres personnalités avant de partir, notamment mon grand-frère Ki-Zerbo.



S.: Ki-Zerbo est-il votre grand-frère biologique ou idéologique ?



A.C.: (Rires). C'est d'abord mon grand frère biologique et ensuite, nous militons ensemble dans l'Internationale socialiste. Moi je ne confonds pas la politique et les rapports humains. C'est ce qui me différencie de beaucoup d'hommes politiques. Il y a des gens avec lesquels j'entretiens des rapports politiques car nous sommes proches idéologiquement. Avec le Pr Ki-Zerbo, on est proche idéologiquement et c'est un ami personnel. Ce qui manque à l'Afrique, c'est le dialogue. A partir du moment où nous avons tous les mêmes buts, c'est-à-dire se battre pour assurer le bonheur à notre peuple, il n'est pas normal qu'on ne puisse pas en discuter librement, quelles que soient nos divergences. Le parti au pouvoir doit discuter avec l'opposition et vice-versa. Moi, je discute avec tout le monde au Burkina. J'ai un passé commun avec beaucoup d'hommes politiques burkinabè, même si aujourd'hui, certains sont dans le gouvernement et d'autres dans l'opposition.



S.: On remarque qu'Alpha Condé est assez fréquent au Burkina. Quelles sont les raisons qui vous amènent au pays des Hommes intègres ?



A.C.: Les Congolais, les Gabonais et les Sénégalais vous diront également que je suis régulier chez eux. En 2003, j'ai été plus dans les pays d'Afrique centrale qu'au Burkina. Je ne suis pas venu au Burkina avant d'aller aux Etats-Unis et c'est lorsque j'y étais que la guerre a commencé en Côte d'Ivoire. Et pour moi, ne pas venir au Burkina serait une prise de position. J'ai aussi été en Côte d'Ivoire à l'occasion de la rencontre de l'Internationale socialiste et mes prises de position ont suscité beaucoup de polémique. Je suis un homme politique responsable, indépendant et quelles que soient mes amitiés, je prends des positions que j'estime justes. Il y a donc deux mois et demi que je suis venu m'expliquer avec le président Blaise Compaoré comme je dois aller en Côte d'Ivoire m'entretenir avec le président Laurent Koudou Gbagbo.



S.: Quelles ont été ces prises de position qui ont tant dérangé ?



A.C.: J'ai été très clair : j'avais dit que le président Gbagbo est le président légitime et qu'il n'était pas normal qu'il soit renversé par la force. Mais j'ai affirmé en même temps que je n'étais pas d'accord avec les exactions. Lorsque je me suis rendu à la réunion de l'Internationale socialiste à Abidjan, j'ai dit à mes amis à huit clos qu'on doit se dire les quatre vérités. J'ai expliqué que la loi foncière était mauvaise bien qu'elle ait été votée à l'unanimité par tous les partis politiques ivoiriens sous la présidence d'Henri Konan Bédié. On ne peut pas dire que seuls les Ivoiriens peuvent posséder la terre. J'ai dit aussi que dans la sous-région, la Côte d'Ivoire est le seul pays à imposer une carte de séjour aux étrangers, ce qui n'est pas normal et qu'il fallait la supprimer. J'ai fait une série de critiques amicales qui n'a pas plu. J'ai eu aussi à critiquer certains hommes politiques qui ont tenu des propos guerriers et cela était irresponsable. J'ai affirmé sur les antennes d'une radio que l'ivoirité était comme l'idéologie Le Pen en France. Je ne parle pas pour faire plaisir à des amis mais je dis ce que je pense franchement, quitte à ce que je m'explique avec mes amis par la suite.



S.: Vous pensez avoir été compris ?



A.C.: Je crois que nous sommes des amis et nous avons des objectifs importants qui nous lient. Nos relations amicales ne souffrent pas de ces différentes positions. Chacun a son pays, nous avons des intérêts qui coïncident mais il y a des moments où on peut avoir des positions différentes.



S.: Selon vous, quelle est la nature de cette crise ivoirienne?



A.C.: Je connais la Côte d'Ivoire depuis très longtemps. C''est dans mon bureau que l'opposition ivoirienne dans les années 1990 se réunissait. Nous avons eu à travailler longtemps ensemble.



La première des choses, c'est qu'il y a une réalité qu'on ne veut pas dire. Dans les années 1976-1977, si vous vous appelez Sylla, Diabaté ou Touré, on dit que vous n'êtes pas ivoirien. Ceux qui avaient des noms dioula n'étaient pas considérés comme des Ivoiriens par ceux du Sud ou de l'Ouest. C'est un vieux problème qui se posait depuis le temps d'Houphouët- Boigny. Cela était masqué parce que le président Houphouët avait su mettre à la tête de certaines institutions des gens qui venaient des quatre coins de la Côte d'Ivoire. Malheureusement, le président Bédié a théorisé l'ivoirité , ce qui a aggravé une situation qui était réelle. Ensuite, on a le fait que les grands commerçants étaient originaires du Nord. Pendant la période coloniale on a tenté de transférer les richesses du Nord au Sud, ce qui a provoqué le sous-développement du Nord. Tous ces problèmes devraient éclater un jour. Le président Bédié les a précipités et aggravés. La crise ivoirienne était donc latente.



S.: Le pouvoir ivoirien affirme qu'il est victime de son option politique. Qu'en dites-vous ?



A.C.: Je n'ai pas à faire de commentaires là-dessus. Si je devais le faire, je le ferais devant les intéressés. Il ne s'agit pas de savoir qui a raison ou tort, mais plutôt de discuter. L'entente entre un certain nombre de leaders en Afrique de l'Ouest est fondamentale pour le progrès de cette région. Nous voulons la démocratie, le respect des droits de l'Homme et le développement, il est tout à fait souhaitable que les hommes qui défendent un certain idéal ou vision politique se rapprochent. Tout ce qui peut les séparer est une mauvaise chose.



S.: Comment se portent aujourd'hui la Guinée et particulièrement votre parti après votre traversée du désert ?



A.C.: La situation en Guinée est un peu surréaliste. Nous avons un président qui reconnaît lui-même qu'il est malade. Dernièrement, il disait qu'il ne pouvait même plus porter de chaussures. Il est donc évident, et tout le monde est unanime, que le président Conté ne peut plus travailler. Bien sûr, personne ne souhaite le malheur de l'autre parce que nous sommes des croyants mais on est obligé de reconnaître que le président est dans une situation où il y a vacance de pouvoir. La constitution guinéenne prévoit qu'en cas de vacance de pouvoir, c'est le président de l'Assemblée nationale qui assure l'intérim pendant soixante (60) jours et organise des élections. Mais le problème est que nous ne reconnaissons ni l'Assemblée nationale ni le Référendum qui a modifié la Constitution.



Ce qui nous amène à dire qu'il n'y a pas de président légitime en Guinée. Par conséquent, nous n'acceptons pas la succession telle que prévue constitutionnellement. Supposons même que nous acceptions aujourd'hui la succession constitutionnelle, elle sera tout de même impossible parce que pour organiser des élections libres et transparentes, il faut d'abord faire un recensement pour l'établissement des listes électorales. Ce qui est impossible en soixante (60) jours. Face à cette situation, on perçoit donc un danger : celui de la chaise vide. Et ceux qui peuvent occuper ce vide, c'est sans doute ceux qui ont des armes. Il y a donc le risque que la Guinée aille vers une transition militaire. Evidemment nous ne souhaitons pas un coup d'Etat militaire mais, quand bien même on n'aime pas la pluie, on ne peut l'empêcher de venir. Si d'aventure, les militaires prenaient le pouvoir, nous souhaiterions seulement qu'il y ait un gouvernement d'union nationale qui associerait tous les partis politiques dans un délai n'excédant pas douze (12) mois. Son objectif sera d'organiser des élections libres et transparentes, comme ce fut le cas au Niger après la mort du président Maïnassara. C'est sûr que lorsque des militaires prennent un pouvoir, la communauté internationale cesse la coopération et demande de fixer les dates des élections. Mais le cas de la Guinée est quand même particulier. Si l'on prend l'exemple du général Bozizé en Bangui, la pression extérieure suffirait pour l'obliger à organiser des élections, parce que sans le franc CFA, il ne pourrait pas payer ses fonctionnaires. Ce qui est différent en Guinée où nous avons notre monnaie et le gouvernement pourra à tout moment assurer les salaires même si la monnaie perdait de sa valeur.



Donc, à la pression extérieure devrait s'ajouter une forte pression intérieure pour revendiquer une transition courte.



On nous accuse de vouloir d'un coup d'Etat. Ce n'est pas juste mais dans la situation actuelle, il n'y a pas de solution constitutionnelle. Mais la seule alternative sera sans doute la voie anti-constitutionnelle.



Pour ce qui est de la vie de mon parti, je dis toujours que j'ai des militants et non des clients. Voilà pourquoi je ne me suis jamais inquiété. J'ai passé deux ans et demi en prison, mais mon parti est resté uni. C'est donc la preuve qu'il est vivant. En Guinée, on présente souvent les partis comme des partis ethniques, ce qui n'est pas mauvais dans une certaine mesure. Aux Etats-Unis, lorsque Bill Clinton est candidat, c'est l'Arkansas qui se mobilise derrière lui; quand c'est Bush qui est candidat, c'est le Texas qui fait bloc pour le soutenir. On ne peut alors prétendre à la magistrature suprême si l'on ne peut même pas avoir une base dans son village ou sa préfecture. Ce n'est pas de l'ethnocentrisme, c'est une évidence pour tout homme politique. Mais le pouvoir a utilisé cela à de mauvaises fins et a fait comprendre à la Basse Guinée que le pouvoir appartient aux Soussou, l'ethnie la plus politisée. Ma politique donc, consiste à gagner ce peuple, et vous pouvez voir le résultat de ce travail dans les journaux. Le quartier "Khalum" qui était la chasse gardée du pouvoir est aujourd'hui gagné par mon parti. Je pense donc que mon parti a beaucoup progressé, mais tout va dépendre de la transition militaire. Aura-t-on un ATT ou un Maïnassara aux commandes? Le problème se situe à ce niveau. Notre bataille, c'est d'empêcher un système à la Maïnassara mais plutôt à la façon de ATT.



S.: Est-ce qu'on peut dire que l'opposition guinéenne est guérie de ses maladies infantiles avec les soubresauts qui l'ont caractérisée pendant les dernières élections présidentielles ?



A.C.: Ce que je ne comprends pas, c'est que vous voulez la démocratie alors que vous êtes antidémocratiques. Pourquoi voulez-vous que l'opposition aille aux élections avec un seul candidat ? Si les élections sont libres et transparentes, il est évident qu'aucun parti ne gagnera au premier tour.



L'essentiel donc pour l'opposition, c'est de faire bloc derrière la candidature de celui qui va arriver en tête après le premier tour et se présenter en challenger face au candidat du pouvoir. Il faut que l'on cesse de vouloir imposer aux oppositions africaines un candidat unique. Bien sûr que si l'on a à faire à une élection à un seul tour, il serait irresponsable que l'opposition parte en rangs dispersés. En Guinée, il existe le Front républicain pour l'alternance démocratique (FRADE) qui regroupe tous les partis d'opposition sauf celui de Siradou Diallo. Sur cette base, nous élaborons ensemble un projet de gouvernement mais qui ne signifie pas que nous allons présenter un seul candidat. Cela veut plutôt dire que quel que soit le candidat qui serait élu dans ce front, il a déjà un programme avec les autres partis et devra gouverner avec eux. Vouloir imposer un seul candidat, c'est comme si l'on demandait par exemple la suppression des autres journaux pour que tous se rallient derrière un seul. C'est anti-démocratique.



S.: Vous parliez tantôt de toilettage de la constitution pour assurer des élections libres et démocratiques. Si tout cela n'est pas fait, allez-vous néanmoins vous présenter aux élections?



A.C.: D'abord personne ne croit à des élections en décembre, et il est évident que d'ici à décembre, il se passerait beaucoup de choses. Par ailleurs, si des élections sont organisées maintenant avec Conté, nous n'y participerons pas. Car, même si nous avons 90% des voix, il se proclamera toujours vainqueur. Mais nous avons clairement dit au pouvoir que nous n'accepterons plus des élections truquées et que nous sommes prêts à aller à l'affrontement. J'avais refusé la violence en disant à mes militants, si on marchait sur le pied, retirez-le. Mais aujourd'hui, l'écrasante majorité est pour le changement et cela a été clairement exprimé le 8 juin dernier quand j'ai organisé un séminaire. Le chef de l'Etat a appelé les forces de l'ordre à disperser la foule, et ce fut la première fois que nous assistons à un affrontement entre la population et les forces de l'ordre qui a duré 13 heures sans pouvoir disperser la foule. Il est clair qu'aujourd'hui, les Guinéens sont prêts à faire ce que les Maliens ont fait sous le règne de Moussa Traoré. D'une façon ou d'une autre, nous allons vers une crise en Guinée: soit le président ne meurt pas et organise des élections, ce qui conduira à une crise, soit il meurt et l'armée prend le pouvoir, ce qui va également conduire à une crise.



S.: Doit-on comprendre que le coup d'Etat est un passage obligé en Guinée?



A.C.: La Guinée a un président qui ne peut plus diriger. Elle a un parlement que nous ne reconnaissons pas. Il n'y a donc pas de solution constitutionnelle sinon celle anticonstitutionnelle. Dans cette dernière alternative, qui peut prendre le pouvoir ? Est-ce que les partis politiques pourront immédiatement prendre le pouvoir ? C'est une question qui se pose à tout moment et peut-être que vous pourrez nous aider à trouver la solution... (Rires).



S.: Avec l'hégémonie de la force internationale, ne craignez-vous pas une intervention extérieure pour vous imposer une solution qui aille contre vos intérêts ?



A.C.: Au Liberia, tous les chefs d'Etat de la CEDEAO étaient pour une solution politique sauf la Guinée. Les Américains ont toujours reconnu que Conté est un dictateur. Mais Taylor, c'est le cancer de l'Afrique de l'Ouest. Les USA se sont appuyés sur le président Conté qui a prôné la solution militaire pour renforcer le mouvement contre le président libérien. Ils ont fourni des armes au LURD en passant par la Guinée. Mais depuis un an, les Américains se sont rendus compte que la solution militaire n'était pas la bonne. Les Anglais étaient même les premiers à reconnaître cela en affirmant qu'il était mieux de trouver une solution politique parce que, si Charles Taylor retournait dans le maquis, il y aurait inévitablement des problèmes en Sierra Leone. Les Américains ont également compris qu'en réalité, le LURD n'est pas mieux que Taylor parce qu'il a bombardé les populations à Monrovia. En plus, ce mouvement est de l'ethnie Mandingue qui ne représente que 10% de la population, et il est évident que, si ce n'est que par les armes, une population aussi minoritaire ne peut gouverner démocratiquement. Les Accords de Marcoussis ont été comme un déclic pour les Américains qui ont envisagé un Marcoussis à la libérienne. Du coup, ni Taylor, ni le LURD, ni le MODEL n'étaient acceptés dans le gouvernement de transition. Il y avait donc à partir de ce moment, une contradiction entre les Américains qui veulent bloquer et désarmer le LURD et Conté qui finance l'armement du LURD pour qu'il prenne le pouvoir.



Mieux, il a été prouvé que l'obus qui est tombé devant l'ambassade des USA au Liberia est une dotation de l'armée guinéenne. Les Américains ont demandé à Conté d'expulser les dirigeants du LURD de la Guinée et de confesser publiquement qu'il n'apportera plus de soutien à ce mouvement. Visiblement, le gouvernement guinéen a perdu son principal soutien que sont les Etats-Unis. Je ne vois donc pas comment on peut nous imposer une solution de l'extérieur.



S.: Est-ce que vous avez vos entrées aux USA ?



A.C.: Si je n'ai pas mes entrées aux USA ou en France, je serais un mauvais politicien.



S.: Du temps de Sékou Touré, la Guinée était un repère sur le plan sportif et culturel. Ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Qu'est-ce qui explique cela?



A.C.: La Guinée ne brille même plus dans aucun domaine. J'ai combattu le président Sékou Touré, mais il faut reconnaître que c'était un nationaliste. Le pouvoir actuel n'a aucune vision, aucun souci de développement du pays. Il y a de cela 6 mois que nous n'avons ni eau ni électricité en Guinée. C'est inadmissible pour un pays qui est reconnu comme étant le château-d'eau d'Afrique. Quand on expose le problème au président, il répond que de toute façon on peut utiliser des lampes-tempête. Quand on lui dit que les prix sont élevés, il répond à la radio que sa femme ne va pas au marché.



Quand on lui dit que les routes secondaires sont mauvaises, il réplique qu'il emprunte les routes principales. Le seul souci de Conté aujourd'hui, c'est d'assurer ses arrières. Et le problème, c'est que, quand il parle, la population pense qu'il plaisante. Dans tous les secteurs, la Guinée a régressé.



Moustapha Niass a dit quelque chose qui m'a fait mal, mais qui est malheureusement vrai. Il a dit que l'histoire de la Guinée s'est arrêtée en 1958.



Effectivement, même les maisons qui sont à Conakry sont pour l'essentiel des constructions de 1958.. La jeunesse a conscience de cette mauvaise gestion et réclame donc le changement.



S.: Qu'est-ce qui explique tout de même que Lansana Conté soit toujours au pouvoir ?



A.C.: Il y a d'abord l'héritage du passé. Le régime de Sékou Touré a été tellement répressif qu'il a créé une sorte de peur physique chez les Guinéens, cassant ainsi l'esprit de révolte. J'ai reçu le témoignage d'une femme dont les forces de l'ordre ont tué le fils. Au lieu de se plaindre contre le pouvoir, la dame a simplement dit que l'ancien régime aurait tué tous ses deux fils. Vous comprenez à quel point la population est terrorisée !



Ensuite, Lansana Conté a cultivé l'ethnocentrisme au sein de la population. Je suis Malinké, et on se rappelle qu'en 1985, cette ethnie a été victime de massacres. Le président utilise cela pour faire croire à la population que je me vengerais des autres ethnies si je prenais le pouvoir. Il faut reconnaître également que la France a longtemps soutenu Conté. En 1993, quand il a perdu les élections et a fait un coup d'Etat constitutionnel, la France, principal bailleur de fonds de la Guinée l'a appuyé. Les Etats-Unis, également, ont soutenu le président sur la crise libérienne. Et pour les petits peuples, lorsque les Etats-Unis soutiennent un président, celui-ci est invincible. Ce qui n'est pas vrai...



L'opposition joue aussi un rôle dans le maintien de Conté au pouvoir. Parce que, contrairement au Mali où la préoccupation était le départ de Moussa Traoré, en Guinée, c'est la question de la succession du président qui intéresse les hommes politiques. Automatiquement, il y en a qui préfèrent maintenir Lansana Conté au pouvoir que Alpha Condé.



S.: Comment a évolué votre idée pour faciliter le départ des présidents du pouvoir ?



A.C.: Beaucoup de gens ont critiqué mon idée, mais je reste convaincu que c'est une nécessité. Au Kenya, le président Daniel Arap Moï a reçu l'assurance des USA qu'il ne sera pas poursuivi par la justice s'il quittait le pouvoir. Ce qui a effectivement été le cas, quand l'opposition a remporté les élections et que le gouvernement a basculé dans l'opposition. Même scénario au Zimbabwe. C'est vrai que dans certains pays, le pouvoir a commis tellement d'exactions que l'entourage même se demande ce qui lui arriverait si le président quittait ses fonctions. En faisant la proposition, j'ai surtout pensé à mon pays et au Togo. C'est évident que si Eyadéma quitte le pouvoir aujourd'hui, c'est Gilchrist Olympio qui prendra les rênes. Eyadéma n'acceptera donc jamais qu'une personne dont il a tué le père prenne le pouvoir de peur qu'il soit poursuivi.



Moi, je suis Malinké, et vous savez qu'en 1985, cette ethnie a été massacrée. Comment voulez-vous que Conté ait l'assurance que si je venais au pouvoir, je ne me vengerais pas. C'est pourquoi j'ai proposé aux opposants que l'on accepte à l'avance de ne pas poursuivre les chefs d'Etat pour faciliter leur départ. La politique, comme on le dit, ce n'est pas un dîner de gala. On a la tête dans les nuages, mais les pieds dans la boue et quand on est trop idéaliste, on ne fait pas de la politique.



S.: Y a-t-il une forte présence des femmes sur la scène politique guinéenne. Quel rôle y jouent-elles ?



A.C.: Depuis 1954, la force déterminante en Guinée, ce sont les femmes. Tout le monde sait que ce sont les femmes qui ont porté Sékou Touré au pouvoir. En Guinée, on parle de la jeunesse, mais on sait que la force déterminante pour le changement, ce sont les femmes. Quand j'ai été arrêté, les femmes ont marché nues pour protester. Il n'y a pas longtemps, les commerçantes sont descendues dans la rue pendant deux jours, parce qu'on ne voulait pas leur attribué les places de vente qu'elles ont contribué financièrement à aménager. Bien que malade, le président Conté a convoqué un conseil de ministres un dimanche pour que l'on redonne aux femmes leurs places parce qu'il était conscient que si le mouvement persistait, cela amènerait la chute du pouvoir. Les femmes constituent donc une force en politique dans notre pays.



L'Afrique



S.: D'aucuns disent qu'entre l'Union africaine et l'OUA, il n'y a que la coquille qui a changé. Que pensez-vous réellement de cette nouvelle instance africaine ?



A.C.: Je ne crois pas qu'il soit juste de dire que ce n'est que la coquille qui a changé. Sur un certain nombre de points, l'Union africaine peut être un progrès. L'OUA était bâtie sur deux principes, à savoir la sauvegarde du pouvoir et le maintien des frontières.



Aujourd'hui, plus rien n'est bâti sur cela. Si dans le temps, la thèse du fédéralisme en Afrique de l'Ouest prônée par certains dirigeants tels que Sékou Touré, Modibo Kéita, avait été battue en brèche par la volonté de la France, aujourd'hui, toutes les grandes puissances reconnaissent la nécessité des regroupements. Elles se rendent compte que vouloir balkaniser l'Afrique, c'est la condamner au sous-développement perpétuel; parce qu'il est impossible qu'on se développe dans le cadre étroit de nos Etats actuels. Au moment où tout le monde est d'accord qu'il faut un regroupement, la nature de l'OUA change nécessairement. Ensuite, il faut dire que l'Union africaine pose un certain nombre de principes tels que un parlement unique, une armée unique, etc. L'évolution de l'Europe nous amène à réfléchir. Quand vous voyez aujourd'hui que l'Allemagne et la France qui ont fait trois (3) guerres mondiales en un siècle, ont une monnaie unique, que les pays ex-communistes se retrouvent dans l'Union européenne et que les chefs d'Etat venus au pouvoir après la colonisation, ont disparu, cela montre que d'autres idées émergent de plus en plus.



Bien sûr, l'Union africaine pose les jalons d'une union future, mais ne pourra jouer véritablement son rôle que si tous les Etats deviennent démocratiques.



S.: Que pensez-vous du NEPAD?



A.C.: Le NEPAD a deux avantages.



Premièrement, ce sont les Africains qui définissent leur développement eux-mêmes.



Deuxièmement, ils le font en commun. Ce sont des avantages d'importance pour le NEPAD qui devrait avoir pour rôle de faire des activités économiques nécessaires à tous les Etats. Mais si chaque pays vient avec son projet, en ce moment, le NEPAD sera vidé de son contenu. Dans sa conception, c'est une bonne chose, mais dans la réalisation concrète, il tourne le dos à ce qu'il devrait être.



S.: Un des problèmes majeurs dans les élections en Afrique, c'est le manque de transparence des scrutins. Que peut-on faire pour éviter les contestations et avoir des dirigeants "bien élus"?



A.C.: Tant qu'il n'y aura pas des élections libres et transparentes, on ne peut pas parler de stabilité en Afrique et on aura toujours des guerres internes. Parce que lorsqu'une opposition est battue plusiurs fois de manière illégale, elle ne voit plus la nécessité d'aller aux élections. Elle envisage alors une autre solution, celle des armes.



Cependant, il faut reconnaître qu'il y a eu du progrès. Par exemple, dans certains pays de l'Afrique de l'Ouest, tels que le Sénégal, le Ghana, le Nigeria, le Bénin, le Mali, etc., il y a eu alternance démocratique. Les dernières élections législatives au Burkina ont été révélatrices. Avant ces élections, j'ai eu l'occasion de discuter avec des journalistes et des hommes politiques et j'étais le seul à dire que l'opposition pouvait gagner ou s'approcher de la victoire. C'était une analyse logique. L'opposition faisait presque 30% avant la mort de votre confrère Norbert Zongo. Il est évident que cet événement a eu un impact tant sur le plan interne qu'international. Nécessairement cela renforçait l'opposition qui se placerait logiquement au-dessus des 40 ou 45%. Evidemment, l'opposition a été dispersée. Mais malgré cela, s'il n'y avait pas eu la crise au sein du parti de Ki-Zerbo (PDP/PS) qui lui a fait perdre le siège qu'il n'a jamais perdu à Ouagadougou et puis à Bobo, l'opposition, toutes tendances confondues, se retrouverait majoritaire.



S.: Sur la Côte d'Ivoire, on a connu Kléber, Marcoussis, Accra, quelle est votre analyse prospective de l'avenir de ce pays ?



A.C.: Je n'ai pas d'analyse à faire ; j'ai toujours émis un souhait. Je souhaite que les dirigeants ivoiriens soient suffisamment responsables pour voir l'intérêt de leur pays et faire en sorte qu'il y ait la paix en Côte d'Ivoire et qu'on arrive à des élections plus démocratiques acceptées par tout le monde. Je serai plus efficace en disant tête à tête à Alassane et à Laurent ce que je pense, que de parler dans la presse.



La Côte d'Ivoire c'est presque 40% des richesses sinon plus de l'UEMOA. La Côte d'Ivoire c'est aussi le pays où on a 3 millions de Burkinabè, 2 millions de Maliens, 1 million de Guinéens, etc.



Lorsque la Côte d'Ivoire explose, c'est toute la sous-région qui explose. Donc personne n'a intérêt à l'implosion de la Côte d'Ivoire.



En tant qu'homme politique, notre intérêt est de discuter avec les dirigeants ivoiriens pour amener chacun à mettre un peu d'eau dans son vin afin de privilégier l'unité nationale et la paix.



S.: Dans la crise libérienne, pensez-vous que le départ de Taylor sera une solution à un retour de la paix dans ce pays?



A.C.: Le départ de Taylor seul ne suffit pas, parce que si aujourd'hui le LURD prend le pouvoir, il y aura nécessairement un autre maquis. Au Liberia, il faut faire en sorte que la prise du pouvoir se fasse par les urnes. Cela suppose qu'il faut désarmer tous les mouvements armés. Quelle que soit la fraction militaire qui prendra le pouvoir, elle sera automatiquement combattue. Il n'y a donc pas de solution militaire au Liberia, il faut arriver à un régime civil issu d'élections transparentes.



S.: Que pensez-vous de la domination du monde par l'Amérique et de la guerre à l'Irak ?



A.C.: Ce qui m'intéresse aujourd'hui, c'est le développement de l'Afrique. Il ne sert à rien de parler de grands problèmes internationaux alors que nous ne pouvons rien. Parlons plutôt des problèmes concrets qui nous concernent. Ce qui nous oppose aujourd'hui aux Américains, ce n'est pas le problème de l'Irak, c'est surtout leur politique de subventions à leurs agriculteurs et qui nous défavorise sur le plan de la commercialisation de nos produits agricoles, notamment le coton.



Au lieu de nous mettre inutilement les Américains sur le dos, combattons leur politique de subventions. Car quel que soit ce que nous dirions les Américains allaient attaquer l'Irak.



Notre défaut est qu'on a tendance à mener la bataille des autres et non la nôtre. Pendant longtemps, les pays européens se sont alignés sur les Etats-Unis et ont accepté toute la politique américaine. Aujourd'hui, les intérêts économiques font qu'ils ne peuvent plus s'aligner, parce qu'il y a la concurrence. Mais, nous, nous ne sommes pas pour l'instant conurrents des Etats-Unis. Pourquoi allons-nous entrer dans un débat qui est celui des grandes puissances, alors que notre problème, c'est la lutte contre la pauvreté et pour la démocratie ?



S.: Et pourtant, nous subissons les conséquences de cette guerre. Par exemple, l'augmentation du prix de l'essence.



A.C.: Si vous payez votre essence plus cher, c'est tout simplement parce qu'on a été incapable de faire l'intégration économique. Le Nigeria qui est le 3e ou 4e producteur de pétrole du monde aurait pu servir l'essence à la sous-région. Les dirigeants nigérians préfèrent importer l'essence parce qu'ils ont plus d'intérêts que de faire fonctionner leurs raffineries locales. Si ces raffineries, qui ont moins de 20 ans, fonctionnaient, le Burkina paierait l'essence deux fois moins cher. Il faut donc mettre cette cherté de l'essence sur le compte de la volonté de nos dirigeants à se remplir les poches que de développer nos pays.



S.: Avec une telle richesse intellectuelle et politique, avez-vous une publication en vue ?



A.C.: Pour le moment, ma préoccupation majeure, c'est de réfléchir sur une sortie de crise en Guinée tant avec la contribution des amis de l'intérieur que de l'extérieur, sans que cela ne plonge notre pays dans une situation difficile.

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