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Message de Jean Louis |
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26.01.2003 10:38:49 |
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Sujet: Le clonage et la religion |
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e-Mail: |
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Pays: France |
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Message:
Cloner des plantes, personne n'y voit de mal. Le clonage des animaux nous dérange un peu plus, mais on cesse d'y penser dès qu'on parvient à dépasser son anthropomorphisme. Car c'est bien l'idée du clonage de l'homme qui fait peur. Pourquoi ?
Est-ce le sentiment confus d'être en présence d'une vision totalitaire de l'homme (et du monde), d'autant plus ambiguë qu'elle est "objectivement" bonne pour la santé ? Pour Lucien Sfez, professeur de science politique à la Sorbonne, l'interdit qui pèse sur le clonage de l'homme est avant tout religieux. Derrière toute position humaniste se cache une position religieuse. Malgré les apparences, la religion est restée très forte. Seul Dieu peut créer la vie ou donner la mort. Qui s'aventure à usurper ce pouvoir s'expose à la colère divine. C'est l'histoire de Frankenstein ou du Golem.
Le clonage n'est pas seulement la transgression d'un interdit divin. Ses conséquences bouleversent les fondements de la société. Au niveau anthropologique, on ne sait pas si le clone est le fils ou le frère de l'original, ce qui anéantit la notion même de filiation. C'est la fin de la famille engendrée, partant la fin de l'interdit de l'inceste et de la loi du père; le clonage élimine le niveau symbolique, qui est distance de soi à soi. Il rend donc impossible aussi bien l'art que la politique et l'économie. Il n'y a plus d'art si il se limite à l'imitation et ne peut plus mettre à distance l'objet qu'il représente. Il n'y a plus de politique si le jeu des différenciations et des représentations ne peut plus s'exprimer. Et il n'y a plus d'économie si tous les objets sont identiques, puisque l'échange n'est possible qu'avec des objets distincts.
Mais c'est que le clonage fascine. Lucien Sfez remarque qu'il engendre des sentiments ambigus. D'une part, l'attirance pour une toute puissance enfin à notre portée; d'autre part, l'effroi (fantasmatique) devant ses conséquences, la punition divine mais aussi la destruction de ce qui fonde la société et l'identité de chacun. Car mon clone n'est ni moi ni un autre. Il est troublant, il sème la confusion et abolit l'idée d'altérité.
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