ELEPHONIE, 25.02.2004
Les Iraniens se ruent sur les portables... à 530 dollars
Des centaines de milliers d'Iraniens ont pris d'assaut les bureaux de poste et les banques pour acheter des téléphones portables à 530 dollars, prix dissuasif ailleurs mais défiant toute concurrence ici, avec l'espoir de pouvoir s'en servir dans un an.
En fait, ce sont les cartes SIM qu'ils se sont précipités pour acquérir à vil prix, comparé aux tarifs appliqués en Iran. Il leur faut encore faire l'acquisition de l'appareil lui-même. Neuf, celui-ci peut coûter de 100 à 1.000 dollars, une véritable fortune en Iran.
Si leur travail le leur impose ou s'ils veulent faire chic, les Iraniens ont le choix pour s'équiper d'un portable: soit débourser 1.200 dollars sur le marché libre, soit attendre les mises sporadiques de lignes sur le marché par les télécoms nationales.
C'est ce que viennent de faire les télécoms. Elles entendent vendre quelque deux millions de lignes d'ici au 20 mars (fin de l'année iranienne) et espèrent récupérer plus d'un milliard de dollars.
Selon les chiffres des postes et télécommunications, quelque 740.000 lignes ont été vendues dans les deux premiers jours de vente, ouverte samedi.
»Les files d'attente étaient plus longues pour acheter un portable que pour voter», ironise un chauffeur de taxi faisant référence aux législatives qui ont eu lieu vendredi.
Les Iraniens ont ainsi versé une somme totale d'environ 390 millions de dollars.
Chaque client a acheté en moyenne entre trois et quinze lignes. La raison en est simple. Dans un pays où les possibilités d'investissement sont rares, où l'on place son argent dans l'immobilier mais aussi dans les automobiles dont le prix augmente d'année en année à l'inverse des autres pays, le portable constitue un placement qui permet de doubler sa mise en un an.
Selon la presse, un Iranien a même acheté 5.000 lignes.
L'afflux de ces nouveaux portables va confronter le réseau à ses limites déjà dépassées. Dans un pays épris de communication, posséder un portable peut tourner au calvaire. On peut renouveler dix fois le même appel pour finir par joindre son correspondant après avoir entendu tous les messages numérisés de la gamme: »le réseau est saturé» ou »votre interlocuteur n'est pas joignable».
L'Iran, dont la téléphonie (fixe ou mobile) est sous monopole de l'Etat, est contraint de faire appel au savoir-faire étranger pour développer un secteur souffrant des maux traditionnels de l'économie nationale.
Un deuxième réseau, privé, vient d'être confié à un consortium international mené par la société turque Turkcell, qui comprend la compagnie suédoise Ericsson et la finlandaise TeliaSonera. Le montant des investissements prévus est de 3,1 milliards de dollars sur 15 ans.
»D'ici à la fin de l'année (iranienne), le nombre des portables passera à 3,5 millions et, l'année prochaine (mars 2004 - mars 2005), deux millions de nouvelles lignes seront opérationnelles», a récemment déclaré Ahmad Motamedi, ministre des Télécommunications.
Le gouvernement veut porter le nombre des téléphones portables à 10 millions d'ici cinq ans.
L'achat des nouvelles lignes devrait coûter moins cher à l'achat (1,5 millions de rials, soit 178 dollars) mais la communication sera plus chère.
En quinze ans, le second réseau de téléphones portables devrait compter 16 millions de souscripteurs.
En attendant, les télécoms ont promis de rembourser ceux qui n'auraient pas leur ligne dans un an.