USTICE, 14.05.2004
l'avocat français de Tarek Aziz et de Saddam Hussein porte plainte contre Londres
A Paris, l'avocat français de Tarek Aziz et de Saddam Hussein, Me Jacques Vergès, a porte plainte contre le Royaume-Uni pour "crimes de guerre" en Irak. La plainte a été déposée devant le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) à la Haye. "La réalité des tortures et d'atteintes systématiques à la dignité des prisonniers irakiens, suivis éventuellement de meurtres, tant de la part des troupes des Etats-Unis que du Royaume-Uni ne fait plus de doute pour personne", assure le texte de la plainte. A l'appui de son action, Me Vergès cite des extraits du rapport du général Antonio Taguba, qui a témoigné mardi devant le Congrès américain, et du rapport du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de février sur les sévices infligés aux prisonniers irakiens par les forces de la coalition. L'avocat a été désigné par Zyad Aziz, le fils aîné de Tarek Aziz.
Mais Qui est Maitre Jacques Verges?
Avocat de réputation mondiale, Jacques Vergès fut résistant, communiste et militant anticolonialiste. Défenseur des causes extrêmes, au carrefour du politique et du judiciaire, il a associé son nom à de nombreux procès sulfureux (Klaus Barbie, Georges Ibrahim Abdallah, Moussa Traoré, Paul Barril, Omar Raddad, Carlos, Bernard Bonnet, Slobodan Milosevic, notamment ...).
Né en 1925 d'un père réunnionnais et d'une mère vietnamienne il est le frère de Paul Vergès, ancien député communiste de la Réunion, président du conseil régional et sénateur communiste de La Réunion.
Me Vergès est l'auteur d'un grand nombre d'ouvrages, notamment de De la stratégie judiciaire, Editions de Minuit, Paris 1981 ; Beauté du crime, Plon, Paris 1988 ; Je défends Barbie (avec une préface de Jean-Edern Hallier), Jean Picollec, Paris 1988 ; J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans, J'ai lu, Paris 1999 ; avec Pierre Marie Gallois L'apartheid judiciaire, L'age d'Homme, Lausanne 2002.
1
Les juges sont comme les cuisiniers. Ils n'aiment pas qu'on les regarde quand ils font la cuisine.
Beauté du crime, p. 12
2
Rien ne me choque autant que l'acharnement sur un vaincu, surtout quand les lyncheurs prennent la pose.
Entre les chiens et le loup, je serai toujours du côté du loup, surtout quand il est blessé.
Ibidem, p. 13
3
Le monde de la justice est un monde clos et cruel à un point qu'on ne peut imaginer de l'extérieur. Ses portes capitonnées sont là pour étouffer les cris, ses vitres cathédrales pour brouiller la vue.
Ibidem, p. 21
4
Dans son montage, l'accusation qui parle au nom de la société est condamnée à faire un roman de gare où tous les poncifs du temps servent d'explication, tandis que la défense doit fuir le terrain piégé du consensus pour se situer par-delà le bien et le mal, donner au crime un sens nouveau et au criminel un visage.
Ce qui les départagera, c'est la beauté.
Ibidem, p. 186
5
Dans un passé pas si lointain, le courage à la guerre était une valeur sacrée. Rappelons-nous Léonidas et ses trois cents Spartiates mourant à Thermopyles pour obéir aux lois de Sparte. Le sacrifice de la vieille garde à Waterloo. Le sacrifice du roi Lazare face aux Ottomans. Ou encore le courage des défenseurs de Stalingrad.
C'est ce que l'on appelait l'honneur. Le mot figure sur les drapeaux de la République en France. ...
Hitler a mis fin à tout cela. Pour lui, ses adversaires ne pouvaient être que des sous-hommes.
Aujourd'hui les disciples de l'OTAN professent le même mépris, chargé de peur et de haine, contre ceux qui contestent leur droit à l'hégémonie.
Le racisme est simplement remplacé par l'idéologie des Droits de l'Homme, dans la version exclusive des généraux Westmoreland, Powell et Clark, bourreaux des peuples du Viêt-nam, d'Irak et de Serbie.
Le procédé n'est pas nouveau. C'est toujours au nom d'un idéal détourné que les conquérants justifient leurs agressions et leur sauvagerie. ...
Aujourd'hui c'est au nom des Droits de l'Homme qu'on tue les civils dans les Balkans, qu'on affame les enfants en Irak et qu'on fait refleurir le pavot en Afghanistan.
L'apartheid judiciaire, p. 72-73-74
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"Un mercenaire du droit"*
A 79 ANS, d'autres auraient déjà raccroché les gants. Jacques Vergès, lui, continue de traverser l'Histoire, selon une trajectoire dont lui seul a le secret.
Résistant à 17 ans, militant communiste à la libération, puis défenseur acharné des activistes algériens du FLN, ce grand baroudeur devant l'éternel, fils d'un médecin colonial et d'une institutrice vietnamienne, s'est fait orfèvre dans l'art de brouiller les pistes.
Plus que tout autre de ses conftères, l'ancien du barrau d'Alger, surnommé depuis « l'avocat du diable », a su se trouver là où on ne l'attendait pas. Avocat du criminel SS Klaus Barbie, du terroriste Carlos ou de Louise-Yvonne Casetta, la trésorière occulte du RPR, l'homme au cigare (façon « barreau de chaise ») a aussi fait sensation en assurant la défense d'Omar Raddad et du préfet déchu Bernard Bonnet.
Et voilà qu'en deux ans l'imprévisible Vergès a réussi la prouesse de se tailler un nom sur la scène internationale. D'abord en volant au secours d'un Slobodan Milosevic, accusé de crimes de guerre par le tribunal de la Haye. Puis en négociant ses services avec l'ex-dirigeant khmer rouge Kieu Samphan. Et en se ruant à la rescousse, enfin, d'un Saddam Hussein humilié par la première puissance mondiale. Ne manquerait plus qu'Oussama ben laden pour que la brochette de ses illustres clients soit complète.
"Une fuite en avant..."
le journaliste Bernard Violet, auteur d'une biographie non autorisée de l'avocat*, ne se montre guère étonné de ce parcours à géométrie variable. « Tant qu'il sera en vie, dit-il, Vergès continuera cette fuite en avant. Sans limite aucune. Le voir défendre Saddam n'est pas une surprise. Mais je pense qu'il va s'entourer d'avocats techniciens, comme souvent, afin de pouvoir multiplier les effets d'annonce devant les caméras. »
Soupçonné d'amitiés avec de sanguinaires dictateurs africains, disparu de la circulation pour d'obscures raisons entre 1970 et 1978, Jacques Vergès s'est toujours débrouillé pour que d'autres alimentent la légende à sa place.
« Depuis son enfance de métis vietnamien, poursuit Bernard Violet, il manifeste un besoin constant de reconnaissance, jusqu'à en être devenu complètement mégalomane. Il a tourné le dos à sa carrière de jeune avocat attaché à ses convictions pour se vendre aux pires bourreaux, pour ne suivre que son aventure personnelle. Derrière une image d'avocat international de premier plan se cache un mercenaire du droit»
ST.B., Le Parisien, 27 mars 2004, p. 6
* "Vergès, le maître de l'ombre", Bernard Violet avec Robert Jégaden, paru au Seuil en 2000.
A la question: "Accepteriez-vous de défendre Oussama Ben Laden." Maître Verges répond sur la chaine M6: " A conditions que Ben Laden ne m'impose pas de faire pousser ma barbe ( RIRE)".
L'"Avocat du Diable " comme on le surnomme continuera à faire parler pendant longtemps!